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La fasciapulsologie, défroisser les blocages

« La fascia… quoi ? Quel  rapport avec le visage ? » Une question à laquelle on n’échappe pas quand on aborde le sujet. Et pour cause : si cette thérapie manuelle récente ouvre des perspectives dans le traitement de nombreuses pathologies, sa pratique par des kinés ou des ostéopathes reste encore confidentiel.

La fasciapulsologie s’intéresse à la globalité du corps en s’appuyant sur deux notions essentielles. D’abord les fascias : ce sont ces tissus conjonctifs qui entourent, soutiennent, et protègent chaque os, muscle, viscère, artère, vaisseau, nerf, organe… Les fascias sont omniprésents dans le corps humain et se ramifient dans tout l’organisme : ils servent de lien de « communication » entre toutes les parties du corps.

Seconde notion: la pulsologie, c'est-à-dire le pouls artériel. Car, hors le sang, pas de vie. Il est la nourritu­re du corps. « La fasciapulsologie est un lien entre la bonne santé du tissu et une bonne circulation du sang », selon Christian Carini, découvreur de la technique. « Cette thérapie utilise les principes actifs du sang, du système neurovégétatif ainsi que ceux des tissus de soutien de l'organisme», résume-t-il. Un principe physiologique simple en apparence mais une pratique dont la subtilité donnerait d'excellents résultats.
Ces fascias, très sensibles à toute forme de stress - physique ou psychologique —, ont une capacité de crispation totalement autonome. Du coup, ils se rétractent à la moindre agression. Cette «microcontracture» s'installe souvent à l'insu de la personne et, si elle n'est pas corrigée, se répercute ailleurs: l'unité fonctionnelle assurée par la liaison des fascias se trouve perturbée. Lorsque les lésions s'accumulent, les dysfonctionnements se développent pour laisser place à une pathologie: la douleur ou la maladie, bénigne ou plus lourde, s'installent lentement, silencieusement.

Ni massage, ni manipulation
Le rôle du fasciapulsologue est de détendre les tissus, de leur redonner un mouvement naturel, et de les nourrir par le sang qui ne circule pas de la même façon dans une zone saine que dans une zone lésionnelle. La fasciapulsologie se fonde sur une technique spéciale: ni massage ni manipulation, elle s'apparente plutôt à une « pénétration » douce du corps, un «toucher intérieur», sensitif.
Les mains du thérapeute suivent des chemins tissulaires et circulatoires pour retrouver les tensions physiologiques et psychologiques subies par le corps. Comme sur une toile d'araignée où le moindre tou­cher « résonne » sur un autre point, le fasciapulsologue remonte, par l'intermédiaire de relais, jusqu'à l'origine de la douleur qui, elle, peut se situer ailleurs et dater parfois de plusieurs années.
Ainsi, une douleur à une vertèbre lombaire - qui, en fait, ne se «déplace » pas toute seule, car c'est lefascia qui l'entoure et permet sa mobilité qui a reçu un «choc» -peut, en fait, trouver sa source dans un dysfonctionnement de l'estomac. De même qu'une tendinite peut remonter à un problème du côlon, ou un acouphène ramener à l'appareil génital perturbé. En premier lieu, le thérapeute privilégie l'examen clinique et l'écoute de son patient, mais toujours en association avec la médecine traditionnelle. Des examens sont faits avant ou après les séances s'ils sont jugés indispensables. Le fasciapulsologue ne recherche pas d'abord la cause de la douleur, ce serait un préjugé qui pourrait fausser le diagnostic: c'est son écoute sensitive du corps qui l'y mènera.

Sur la piste des traumatismes
Notre corps ne traversant pas les étapes de la vie sans nous, la fasciapulsologie considère que le physique et le psychisme ne fonctionnent pas l'un sans l'autre. «Les fascias sont, en quelque sorte, la mémoire du corps, il s'agit donc pour nous de libérer cette mémoire traumatique », explique Christian Carini.
Puisque les fascias forment une chaîne continue, le champ d'action de cette méthode est large: elle vient à bout de pathologies musculaires et articulaires, fonctionnelles (troubles digestifs, gynécologiques, migraines, sinusites...), mais également des allergies, voire des désquilibres neurovégétatifs et endocriniens. La fasciapulsologie trouve également sa place dans la prévention: la main du thérapeute peut découvrir le «blocage» d'une maladie en devenir. Pour les pathologies très lourdes, comme le cancer ou le sida, elle servira de soutien: la douleur et les trai­tements difficiles sont autant de traumatismes supplémentaires, et la « fascia» permettrait de mieux supporter ces épreuves.
Reste que si une séance peut don­ner un résultat parfois spectaculaire, il ne sera que momentané: plusieurs consultations sont nécessaires pour défroisser les blocages, «défaire les nœuds un à un».
Pour les kinésithérapeutes, la fasciapulsologie permet d'ouvrir un champ de compréhension du corps assez complet: en kiné, c'est le mouvement moteur, extérieur, qui prime. Or, lorsque tous les soins ont été faits, comment comprendre la douleur persistante d'une fracture pourtant guérie, ou celle d'une entorse, toujours vivante bien des années après ? Selon la fasciathérapie, si le tissu n'est pas restauré, son traumatisme empêche une guérison totale. De plus en plus de chi­rurgiens sont aussi convaincus par les effets de cette thérapie. « Dans notre discipline, nous avons une perception pragmatique des fascias, explique le Dr Jean-Marc Claisse, microchirurgien spécialiste de la main, au service Urgence Main Auvergne de la clinique de Beaumont (Clermont-Ferrand). En "disséquant" ces fascias, nous sommes témoins de leur rôle primordial. Ainsi, bon nombre d'interventions peuvent être évitées, comme dans les cas de "tennis elbow". »

Depuis plus de vingt ans, Christian Carini enseigne la fasciapulsologie à Paris et à Montréal. Une formation de trois ans minimum est indispensable pour obtenir un diplôme international de fasciapulsologie, complétée par deux années supplémentaires de « post-gradués ». Cinq cents thérapeutes ont été formés. C'est peu. « Cette thérapie demande une attention soutenue et un toucher extrêmement particu­lier. On ne peut pas se permettre d'enseigner à des groupes en surnombre où la transmission de ce savoir perdrait en justesse et donc en efficacité», explique-t-il.
En France, la fasciapulsologie est officieusement reconnue, un peu comme l'est l'ostéopathie. Si elle n'a pas encore fait l'objet d'études, le Conseil national de l'Ordre, en 1986, l'a admise comme une technique de massage televant des compétences du kinésithérapeute, reconnaissance confortée par la puissante Anaes (Agence nationale pour l'accréditation et l'évaluation en santé).

par Françoise Gaspari pour Marie France (Juillet 2001)


Pour plus d'informations (adresses de thérapeutes et formations):
Groupement international pour la défense de la fasciathérapie-pulsologie: association Christian Carini, 159, rue Blomet, 75015 Paris. Tél.: 01 44 19 78 33.

A lire (comme un roman): « Les mains du cœur, la fasciapulsologie: une thérapie qui libère par le toucher la mémoire traumatique du corps et de l'esprit», de Christian Carini {Editions Robert Laf font,250p., 20€ ).

 
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